20020323(sam) — Grand Canyon de 14:30
à 16:30
Par dépit j'entame la retranscription de mes notes de l'Arizona de la façon la
moins originale qui soit, c'est-à-dire chronologiquement !
Je ne m'interdis pas de déroger à la règle cependant. Ainsi donc, depuis mon
arrivée à Phoenix pour retrouver Philippe, peu de temps s'est écoulé avant que
j'avale à nouveau des kilomètres. Bravant la chaleur écrasante de cette fin mars
(facile avec la clim !), nous roulons plein nord en direction de Grand Canyon.
En début d'après-midi, nous voici surplombant cette cicatrice terrestre, et
premier constat : il va falloir que je revoie (à la hausse !) mon système de
mesure — je suis bien incapable d'embrasser du regard l'étendue et la
profondeur du canyon. Quelques photos plus tard (je suis hélas bien persuadé
qu'elles ne rendront rien), nous décidons de continuer notre périple,
choisissant ainsi la moins pénible des deux alternatives qui s'offrent à nous
(la première étant de continuer à explorer le canyon en poussant des ahhhh
admiratifs, la deuxième étant de partir maintenant pour être en mesure de
trouver un motel libre et pas trop cher en route pour Las Vegas).
Steakhouse et Motel 6 ponctuent la soirée, ambiance cow-boy, sciure par terre,
estomacs gavés.
20020324(dim) — Las Vegas
La route menant à la capitale du jeu nous fait passer par le Hoover Dam.
Spéculation quant à la raison d'être de l'imposant barrage de police que nous
devons franchir avant d'atteindre le plus grand barrage de l'ouest (peut-être
s'agit-il de prévenir un quelconque attentat visant à inonder une majeure partie
du Nevada ? Le Hoover Dam serait-il un point névralgique particulièrement
sensible ?) Curieusement, au niveau
du barrage, nous changeons d'heure.
Au dépaysement horaire s'ajoute, une centaine de miles plus loin, la sensation
curieuse d'arriver au milieu de nulle part : Las Vegas s'étend devant nous,
telle une oasis délirante en plein désert.
Nous descendons le Strip, à gauche des casinos, à droite des casinos, devant
nous... des casinos. Première impression : Oh putain c'est gigantesque (et le
Grand Canyon, à côté, c'est peanuts...)
Deuxième impression : kitsch attack ! Assaut de couleurs flashy, de panneaux
lumineux et de blips en folie. Bienvenue dans l'univers de Siegfried et Roy :-)
Notre chambre au MGM Grand est idéalement située en face du NYNY, au 26e
étage. C'est la première fois que je dors dans une chambre aussi luxueuse, et je
crois bien que mes dernières barrières mentales s'effondrent quand je teste le
lit mega-king-size :-) Maintenant
c'est décidé, je me laisse impressionner. Nous enchaînons la visite des
hôtels-casinos (Caesar's Palace où nous profitons du buffet, Treasure Island,
Paris, The Venitian...), tout en refusant d'être blasés. Autant jouer le jeu !
Légèrement désorientés après une journée passée à s'extasier dans tous les sens,
c'est l'esprit vide que nous claquons quelques dizaines de dollars aux machines
à sous du MGM, bien aidés, il faut le dire, par les margaritas et les
ding-ding-ding des voisins qui gagnent, EUX !
20020325(lun)
Nous tentons de rejoindre San Francisco. Sur la carte ça n'a pas l'air si loin
que ça... (c'est sans doute l'effet Las Vegas : on s'habitue au gigantisme).
Il nous faudra pourtant toute la journée pour approcher de SF.
En chemin nous passons par Mojave, où un hangar à avions abritant une
cinquaintaine d'appareils en plein désert me laisse perplexe...
Nous passons la nuit dans un Super 8 Motel, à Merced. Jusqu'ici tout se passe
très bien au niveau du couchage, la seule contrainte que nous nous étions
imposés étant la réservation de la chambre au MGM. Maintenant, nous sommes
libres de poursuivre notre road movie comme bon nous chante.
20020326(mar) — The Coolest Place on the Face of the Earth
Je ne saurais pas dire pourquoi San Francisco nous a autant plu (j'inclus
Philippe dans cette remarque :-)).
Les multiples références et associations d'idées qui m'assaillent ? À la
recherche du 28 Barbary Lane, de la maison bleue adossée à la coline, des traces
de la beat generation et de la littérature américaine que j'adore ? Kerouac et
Ginsberg au City Lights Bookstore, Castro, Mission et Chinatown jouxtant le quartier historique et
ses cable cars, l'océan tout proche, et ses ponts incroyablement arrogants (et
superbes), le jardin japonais du Golden Gate, le fait que cette ville est
gigantesque et néanmoins, contrairement à toutes les autres villes américaines,
construite à l'échelle humaine. La sensation qu'il faudrait plus d'une vie pour
en venir à bout, et pourtant la certitude que nous vivrons un jour ici.
En attendant, je mitraille la ville sous tous ses angles. Je repère le terrain
en quelque sorte :-)
En fin de journée nous retrouvons Olivier. Je regrette de ne pas pouvoir rester
plus longtemps, j'aimerais qu'il me raconte sa vie à San Francisco (bientôt deux
ans qu'il travaille pour France Télécom là-bas). Nos liens d'amitié ont su
résister à la distance, ce qui me réjouit pleinement !
Mention excellent au restaurant de sushis où nous faisons la queue pendant une
heure pour profiter des talents culinaires du chef (croyez-moi, ça en valait la
peine !), et mention très bien au Martuni's et à son ambiance feutrée.
20020327(mer) — Leaving San Francisco
Le temps s'étire alors que nous profitons de cette journée magnifique pour
flâner dans la ville la plus cool du monde.
20020328(jeu) — Scenic Highway 1
La plage de sable blanc de Carmel me fascine. Nous sommes arrivés dans un coin
paradisiaque, presque perdu (néanmoins très bourgeois), et le temps se dilate
encore. Les miles défilent et le paysage se transforme sous nos yeux (subitement
je pense à Roger Zelazny et à la saga des neuf princes d'Ambre, j'ai
l'impression que la texture du paysage se modifie sous l'effet de ma seule
volonté). Je fais apparaître au détour d'une crique une côte sauvage et
verdoyante, tenant à la fois de la Corse et de la Bretagne (la petitesse de mes
références m'effraie ;-)). Je fais naître,
telle une émanation de mon cerveau, une cohorte d'éléphants de mer traînassant
au soleil. Les écureuils mangent dans ma main. Les noms des villages que nous
traversons sont d'un autre pays et d'un autre temps. San Luis Obispo, Santa
Barbara.
20020329(ven) — la fin du rêve
Après avoir passé la nuit à proximité de l'aéroport international de LAX, nous
jouons au parfait touriste, pratiquement blasés. Sunset Boulevard me fait assez
peu d'effet, le Chinese Theater et le Walk of Fame évoquent quelques lointains
souvenirs d'actualités cinématographiques, et les énormes lettres HOLLYWOOD ajoutent à l'aspect cliché du lieu.
Seul le fait d'emprunter Mulholland Drive me tire de ma torpeur ;-)
Venice Beach est immense, et ce retour au gigantisme scelle la fin du voyage.
Nous n'en finissons pas de traverser Los Angeles (j'ai d'ailleurs acquis la
conviction d'avoir découvert une vérité fondamentale : Los Angeles n'existe
pas), et la boucle est bouclée une fois de retour à Phoenix, où nous arrivons
vers minuit, claqués et heureux !